Au nom d'Allah, le Clément, le Miséricordieux
PRÉFACE DE LA QUATRIÈME ÉDITION (ARABE)
Louange à Dieu et que la paix soit sur les serviteurs
qu'Il a élus.
Dieu créa l'homme et la femme et a voulu qu'ils se
meuvent dans les profondeurs de la difficile expérience vivante, pour
qu'ils puissent se comporter, avec responsabilité dans la sphère du
permis et de l'interdit… le Paradis fut –selon le Noble Coran- le
premier lieu de l'épreuve: ils pouvaient, telle fut l'objet de l'épreuve,
manger là où ils le voulaient, de tous les fruits du Paradis et de tous
ses arbres, sauf d'un seul. Tout se passait bien dans le sens du respect
de l'engagement car l'homme et la femme ne connaissaient qu'une seule
dimension de l'expérience: celle consistant à obéir et à se conformer
aux recommandations de Dieu. Mais envieux et injuste, Satan qui fut
mécontent de la création d'Adam et de l'honneur qu'il obtint auprès de
Dieu refusa, par orgueil, de se prosterner devant lui, puis profita de
la naïveté d'Adam et d'Eve, de leur bonté, de leur faiblesse et de leur
manque de fermeté et de volonté pour leur insuffler l'idée
obsessionnelle. Il les incita donc à découvrir l'autre dimension de
l'expérience et, les plongeant dans des rêves agréables, il les poussa à
s'interroger: pourquoi cet arbre a-t-il été interdit parmi tous les
autres? Ils ne pouvaient pas trouver la réponse, mais il la leur
insuffla: c'est l'arbre de la vie éternelle, l'arbre des biens
inépuisables. Celui qui en mange ne connaîtra pas la mort!
De la sorte, le premier rêve prit place dans
l'imaginaire de l'homme et de la femme. Ils en mangèrent donc sans
réfléchir et sans se pencher sur les conséquences négatives de cet acte…
Ils trébuchèrent ensemble et leurs nudités apparurent à leurs yeux.
Alors, ils se mirent à se couvrir avec des feuilles cueillies sur les
arbres du Paradis.
L'initiative était prise par l'homme et la femme,
mais Adam en fut seul responsable. Cependant, Adam reçut des paroles de
son Seigneur qui lui accorda le pardon et le dirigea sur la bonne voie.
L'homme comprit, et sa femme aussi, ce qu'est Satan.
Ils saisirent aussi ce qu'est l'autre dimension des choses et ce qu'est
l'expérience dans ses conséquences négatives et positives… Ils saisirent
ce que veut dire la responsabilité dans son contenu spirituel,
intellectuel et pratique… Ils saisirent ce qu'est le terrain du conflit,
ce qu'est l'éducation de soi par la crainte révérencielle (taqwâ) et ce
qu'est la culture de la volonté par la détermination et la fermeté.
Adam descendit donc avec sa femme et ils s'établirent
sur terre. Satan descendit avec eux pour que prenne naissance, dans le
bas-monde, l'histoire du conflit entre la raison et l'instinct, entre le
vrai et le faux, entre le bien et le mal.
Les messages divins se succédèrent pour mettre
l'homme et la femme, ensemble, face à la responsabilité. Si la
continuité de la vie s'assurait à travers leur interaction physique, de
telle sorte que chacun d'eux, pris séparément, ne pouvait aucunement
reproduire la vie dans la nouvelle naissance, l'évolution spirituelle
ainsi que le développement pratique et la prospérité matérielle de la
vie ne pourraient prendre leur élan que dans la responsabilité commune.
Ainsi, chacun –de l'homme et de la femme- a un rôle qui correspond à ses
caractéristiques spécifiques les distinguant l'un de l'autre et un rôle
commun qui correspond à la communauté de leur appartenance humaine et à
celle de leur volonté, de leur pensée et de leur mouvement.
Ainsi, Dieu voulut que l'homme et la femme mettent
leur raison en action afin d'équilibrer l'affectivité en la sauvegardant
de l'évanouissement et de la déviation. Il voulut qu'ils fertilisent
l'affectivité pour ainsi raffiner la raison en l'empêchant de se durcir
et de dépasser la mesure. Il leur dit qu'il se peut que l'un d'eux soit
plus affectueux que l'autre, en vertu de ses caractéristiques propres
relatives à la masculinité ou à la féminité, à la paternité ou à la
maternité… Mais cela ne doit pas empêcher la raison d'être puissante,
supérieure et dynamique. La raison ne doit être ni figée ni exclue. Il
faut la consulter même pour se prononcer au sujet des sentiments
relevant du domaine de l'affectivité; il faut s'ouvrir à la raison même
quand il ne s'agit que des petites choses de la vie.
A la lumière de cet enseignement, la législation
islamique cherche à assurer l'équilibre humain et s'intéresse au rôle
central de l'équilibre dans la vie. Elle légifère pour l'homme et la
femme pris ensemble; ce qui exige la diversité à l'intérieur de l'unité;
ce qui enrichit le contenu intérieur de l'unité à travers la diversité
des éléments aux caractéristiques différentes et permet de discerner
l'utile dans ce qui est permis et recommandé et le nuisible dans ce qui
est interdit et rejeté. Et tout cela à la suite de l'étude minutieuse de
ce qui peut leur être avantageux et de ce qui peut rendre meilleur le
monde qui les entoure.
Pour toutes ces raisons, il est indispensable de se
pencher sur la question des droits de la femme dans la vie, à travers le
contenu théorique de ces droits pris dans leur rapport avec le sens de
ce qui est avantageux pour la vie pratique, et non à travers le contenu
de nos sensibilités affectives. Le caractère limité de notre univers
implique que chacun de ces phénomènes, ou des éléments constitutifs de
ces phénomènes, perde une partie de son être, de sa conscience, de son
tempérament, de son statut ou de ses ambitions, au profit de l'autre. Et
ce pour que, dans la vie, il y ait, pour ainsi dire, et puisqu'il est
impossible d'atteindre l’absolu, des concessions réciproques pour que
chacun échange avec l'autre ce qu'il lui prend contre ce qu'il lui donne.
Le problème de certains penseurs est, peut-être, dans
le fait qu'ils se laissent absorber par le drame du sujet au lieu de
s'intéresser à l'équilibre de la vie. Ils se détournent ainsi de la
réalité pour sombrer dans le déséquilibre, ce qui est un drame encore
plus douloureux, dans la mesure où le préjudice touchera les deux
parties, l'homme et la femme, à la fois. Car ce que l'une des deux
parties fait, sans prise en considération du pour et du contre, est
nuisible pour cette partie elle-même et pour l'autre partie.
Ces considérations sont en rapport avec la question
des libertés et des modalités de leur respect, lorsqu'on a à observer la
réalité sous tous ses aspects et lorsqu'on a à être conscient de toutes
les dimensions du problème humain, pris dans son sens réel. Il se peut
qu'une contrainte, donc quelque chose d'indésirable en soi, soit imposée
à la femme. Mais il se peut aussi que cette contrainte conduise à
quelque chose de positif vu sous l'angle de l'équilibre du mouvement
vital. Il se peut aussi qu'une contrainte semblable, en rapport avec ses
responsabilités et ses devoirs, soit imposée à l'homme. Elle pourrait
porter atteinte à son orgueil mais pour lui assurer beaucoup de bien sur
le plan de l'équilibre des droits et des devoirs qui sont communs à
l'homme et à la femme.
Le problème est que beaucoup de gens regardent le
tableau sous un seul angle et se penchent sur un seul aspect des
problèmes. Ils ne s'aperçoivent pas, de ce fait, du secret qui explique
la présence de la beauté ici et de la laideur ailleurs, du bien sous cet
aspect-ci et du mal sous cet aspects-là.
Ces réflexions sont une tentative pour saisir la
ligne de l'équilibre dans le regard que porte l'Islam sur la femme
considérée dans son indépendance, mais aussi sous l'angle de sa vie avec
l'homme, sous l'angle de sa responsabilité dans la vie et dans les
appels discrets de son humanité et de ses aspirations.
Il nous semble que, dans leurs expériences dans le
domaine de l'ijtihâd (effort intellectuel),
les jurisconsultes doivent multiplier leurs efforts et se pencher sur
l'affaire avec l'ouverture intellectuelle nécessaire pour comprendre le
texte sans rester prisonniers des aspectes négatifs de la réalité. Et ce
pour découvrir la profondeur de la conception islamique de cette
question vivante qui continue à alimenter les discussions qu'elles
soient au niveau des idées, de la législation, de la méthode et du
mouvement…. Certaines fatwa (qualifications
juridiques) sont prononcées, il est vrai, à partir de conditions
subjectives et non objectives.
Nous espérons tant que ce livre arrivera à traduire
la contribution de la conception islamique de la femme et que les
observations et remarques des lecteurs seront assez critiques pour
corriger l'erreur, empêcher la déviation et éclairer l'idée.
Louange à Dieu, le Maître des Mondes!
Nous comptons sur Lui,
Il est le meilleur de ceux auxquels on se confie!
23 shawwâl, 1413 de l'hégire
Muhammad Hussein Fadlullah
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