LE DIVORCE
Lorsque nous étudions la relation conjugale telle
qu'elle se présente dans la législation islamique, nous trouvons que
l'Islam la considère, du point de vue des dépenses matérielles, comme
relevant des responsabilités de l'homme. C'est qu'il n'est pas possible
pour la femme de prendre, tout seule, cette responsabilité, dans la
mesure où la nature particulière de la femme, nature représentée par la
grossesse, l'accouchement, l'allaitement et la maternité en général
l'empêchent de prendre les responsabilités de la vie conjugale et, en
plus, des devoirs qui lui sont consécutifs et qui pourraient peser sur
son corps et sur toute sa vie. La maternité pèse sur le corps de la
femme et ce en plus du temps et de l'énergie qu'elle dépense alors que
la paternité ne pèse ni sur le corps de l'homme ni sur son temps.
D'où, il n'est normal que la femme prenne sur elle la
responsabilité de la vie conjugale. Il n'est pas réaliste, ni pratique
non plus que la femme prenne sur elle, au nom du partage ou de la
participation, la responsabilité d'une partie des charges de la vie
conjugale. La raison est que toute femme n'est pas capable de travailler
comme l'homme peut le faire. Ainsi, c'est l'homme qui est chargé de la
responsabilité des dépenses conjugales, c'est-à-dire de ses propres
dépenses, de celles de sa femme et de celles de ses enfants. Et il est
naturel que celui qui prend la responsabilité absolue de la vie
conjugale soit celui qui prend aussi la responsabilité de sa rupture,
car c'est lui qui subit les conséquences nuisibles de sa rupture. Il est
normal aussi que la femme, qui n'est nullement responsable de la vie
conjugale, même pas de un pour cent de cette vie, il est normal qu'elle
ne perde rien avec la rupture de cette vie. Nous le disons ainsi lorsque
nous parlons avec sang froid et sans prendre en considération les
circonstances particulières et imprévues qui peuvent intervenir au
niveau de l'homme et de la femme car la législation ne légifère que pour
la tendance générale. C'est pour cette raison que le divorce appartient
à l'homme.
Il y a une autre question à caractère général mais
qui a des exceptions: il s'agit de la dimension affective de la
personnalité de la femme qui peut la pousser à se précipiter vers le
divorce d'une manière affective et non réfléchie. De son côté, l'homme
réfléchit beaucoup avant de divorcer dans la mesure où le divorce le met
face à beaucoup de responsabilités et le prive de beaucoup de moyens et
d'occasions d'organiser sa vie publique et privée.
Il se peut que certains hommes ne soient pas capables
de se montrer responsables de leur décision et de l'exercice de leur
droit de divorcer. Il se peut aussi que certaines femmes se montrent
capables de réfléchir avec sérénité et d'une manière convenable dans ce
domaine. Mais la tendance générale reste la même et c'est elle qui est
concernée par la législation. Cela peut être confirmé par la parole
divine disant: "Les hommes sont responsables des femmes en vertu
de la préférence que Dieu leur a accordé sur elles et à cause des
dépenses qu'ils font pour assurer leur entretien"
La supériorité est située dans le domaine des
caractéristiques subjectives et c'est elle qui donne le droit de
contrôler la maison conjugale, de gérer ses affaires et de décider du
divorce. La supériorité ne touche pas d'autres domaines car Dieu ne
soumet pas la femme à l'homme en dehors du cadre de la vie conjugale et
des sphères en liaison avec cette vie.
LE DIVORCE: LE LICITE LE PLUS DÉTESTABLE
Cette question ne possède pas en Islam des limites
légalement obligatoires, mais plutôt des limites morales. Quand nous
lisons la Tradition prophétique disant: "Le divorce est le licite
que Dieu déteste le plus", nous constatons que le sens qu'elle
inspire est la nécessité pour l'homme qui veut exercer son droit de
divorcer, de l'exercer en s'ouvrant à Dieu, en désirant qu'il soit aimé
par Dieu. Si Dieu a permis le divorce dans l'intérêt des humains,
l'homme ne doit pas le prendre et l'exercer au gré de ses caprices. Car
même si le divorce est licite, il est un licite détesté par Dieu et, de
ce fait, il est répréhensible et, avec son caractère répréhensible, il
s'approche de l'illicite. Il va de soi que l'homme qui cherche à ce que
Dieu soit satisfait de lui et à ce qu'il soit aimé de Dieu et proche de
Lui ne divorce pas par caprice ou au gré de ses fantaisies. Il est
nécessaire, avant de divorcer, d'étudier la question d'une manière
rigoureuse et profonde pour n'agir qu'après avoir épuisé tous les moyens
susceptibles de sauvegarder la relation conjugale dans sa continuité,
dans sa clarté et dans sa force. Il est nécessaire d'agir tout comme
s'il s'agissait d'une opération extrême qui n'intervient qu'une fois le
problème ou la maladie arrivés à la limite du danger. Il va de soi aussi
que toute loi ne peut se protéger qu'à travers la personne qui
l'applique: à supposer que, du point de vue de l'Islam, le divorcer est
conditionné et soumis à des règles précises et bien déterminées, les
hommes peuvent toujours contourner les règles pour s'installer dans la
situation de permissivité qu'ils désirent.
Nous remarquons, par exemple, que Dieu ne permet pas
à l'homme de récupérer, sans droit, la dot qu'il avait payée à sa femme.
Il ne lui permet non plus de la soumettre à des pressions dans ce
domaine. Mais certains maris peuvent se comporter vis-à-vis de leurs
femmes d'une manière inacceptable du point de vue moral, ou perverse du
point de vue légal. Ils peuvent être poussés à la faire sous la pression
de leurs caprices et passions dans le but d'obliger les femmes à tout
abandonner pour obtenir le divorce. En se comportant ainsi, l'homme ne
fait que contourner l'interdiction légale en suivant la voie qui oblige
la femme à accepter l'abandon de ses droits.
A partir de ces faits, nous pouvons dire que beaucoup
d'affaires, et surtout celles relatives aux relations humaines, ne
peuvent être soumises à des règles géométriques qui les mettraient en
mouvement en fonction de certains calculs, ou qui les mettraient en
repos en fonction de certains autres calculs. Il est nécessaire, à ce
propos, que la personnalité islamique morale qui s'incline devant ce qui
est permis par Dieu comme elle le fait devant ce qui est interdit par
Lui, se manifeste à travers les options morales qui rapprochent l'homme
de Dieu.
LE DROIT DU JUGE LÉGAL DE PROCÉDER AU DIVORCE
Si un homme abandonne sa femme sans prendre ses
responsabilités envers elle en ce qui concerne les dépenses, avec tout
ce qui est impliqué par la dépense et par les échanges normaux de la vie
commune, le juge légal peut alors procéder à divorcer la femme à sa
demande. Le mari doit auparavant choisir entre le divorce ou le retour
aux échanges normaux de la vie commune. Si l'homme refuse les deux
options, le juge légal peut alors procéder au divorce. Cela se dégage du
Livre de Dieu qui fait situer la vie conjugale entre deux lignes en
disant: "… Reprenez donc vos épouses d'une manière convenable, ou
bien renvoyez-les décemment". Coran, al-Baqara (la Vache), II
229.
Ainsi, si l'homme ne retient pas la femme, en lui
donnant sa place à l'intérieur de la sphère conjugale selon les normes
reconnues, il doit la laisser partir selon les normes reconnues. Cela
veut dire qu'il doit divorcer pour que la femme puisse agir et vivre
librement à l'abri de ses pressions. Mais s'il refuse les deux options,
le juge légal peut alors procéder au divorce.
LES CAS OÙ LA FEMME PEUT DIVORCER ELLE-MÊME
La femme peut dissoudre le contrat de mariage si,
après la conclusion du contrat, elle découvre des défauts légaux au
niveau de l'homme. Si elle trouve, par exemple, que son mari est
sexuellement impuissant, elle peut, conformément à l'enseignement de
l'Islam, porter l'affaire devant le juge légal. Celui-ci lui donne le
délai d'un an durant lequel sa femme continue à vivre avec lui
normalement. Si à l'expiration du délai l'impuissance ne disparaît pas,
la femme peut alors dissoudre le contrat de mariage et obtenir, tout
ordinairement, sa liberté. On fait de même si l'homme perd ses facultés
mentales pendant la vie conjugale.
La femme peut user de ce même droit si l'homme
dévoile un défaut physique que sa femme veut garder secret.
Tout cela concerne les situations qui interviennent
de manière imprévue. Il existe d'autres situations où la femme peut
introduire, dans le contrat de mariage, une condition lui donnant le
droit de divorcer elle-même. Les jurisconsultes musulmans ne s'accordent
pas sur la formule à suivre.
Pour les jurisconsultes sunnites, la femme peut poser
la condition en disant par exemple: "Je me marie avec toi à condition
d'user du droit de divorcer moi-même".
Pour les jurisconsultes chi'ites, cette condition est
contraire à l'enseignement du Coran et de la Sunna, car la forme normale
et naturelle est celle qui donne le droit de divorcer à l'homme et
l'homme ne peut pas abandonner son droit pour le donner à un autre homme
ou à la femme.
Mais il existe un solution: la femme peut poser la
condition d'être elle-même la mandataire de l'homme pour divorcer
elle-même en son nom. Ainsi, le mandat ne contredit pas le fait que
l'homme continue à être l'ayant droit de divorcer dans la mesure où la
femme tire de lui son droit de se divorcer elle-même et dans la mesure
où c'est lui qui l'a mandatée pour divorcer. L'homme peut aussi mandater
une autre personne ou un savant religieux pour divorcer sa femme. Le
mandat ne peut pas être séparé du contrat car il n'est pas issu de la
formulation de la procuration, mais de la condition inhérente au contrat.
Et comme les Musulmans ne peuvent que respecter leurs engagements,
l'homme ne peut nullement séparer la procuration du contrat.
La femme peut donc, si elle sent que des événements
imprévus pourraient intervenir à l'avenir de sa vie conjugale et
l'obliger de se séparer de son mari, user de ce droit en le fixant sous
la forme d'une condition à l'intérieur du contrat de mariage. Cela peut
se faire de manière absolue en lui disant: "zawwajtuka nafsi 'ala sharti
an akuna wakilatan 'anka fi talaqi nafsi mata aradt" (Je me marie avec
toi à condition de me substituer à toi pour divorcer quand je le
voudrais), ou en posant des conditions relatives par exemple au mariage
de son mari avec une autre femme. La femme peut fixer toutes les
conditions qu'elle veut à l'intérieur du contrat. Et de la sorte,
l'Islam ne limite pas l'espace de la femme et ne l'enferme pas dans la
mesure où il lui donne la possibilité d'user de sa liberté pour mettre
fin à la relation conjugale à travers les conditions qu'elle peut fixer
à l'intérieur du contrat.
Il est important de remarquer à ce sujet que beaucoup
d'hommes s'éloignent –dans leurs relations avec leurs femmes- des
moralités de l'Islam et agissent à partir des fausses idées selon
lesquelles l'homme peut exercer un plein pouvoir sur la femme qu'il peut
frapper, insulter ou chasser de la maison. Dans les conditions actuelles
où la déviation est devenue un phénomène social imposant, nous
encourageons le fait que la femme use de son droit de divorcer elle-même,
pour ainsi freiner l'évolution de l'homme dans le mauvais sens.
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