LA POLYGAMIE
Le Noble Coran a évoqué la polygamie au sujet de
laquelle il dit:
"…Épousez comme il vous plait, deux trois ou quatre
femmes. Mais si vous craignez de ne pas être équitables, prenez une
seule femme, ou celles que vous possédez. Cela vaux mieux pour vous que
d'avoir à entretenir une grande famille…" Coran, "an-Nisa’" (les
Femmes), IV 3.
La monogamie est la forme originelle et essentielle
du mariage car Dieu –qu'Il soit exalté et glorifié- a voulu que la vie
conjugale soit une cohabitation réciproque et un mouvement humain vers
l'établissement d'une relation équilibrée fondée sur le climat de
l'amour et de la compassion signalé par le verset qui dit: "Elles sont
un habillement pour vous et vous êtes un vêtement pour elles"… Coran,
al-Baqara (la Vache), II 187.
Nous pensons que la monogamie est l'origine, mais il
est permis à l'homme de sortir des limites de l'origine pour la
polygamie lorsque certaines situations interviennent et certains
problèmes se posent devant lui.
Mais la question de la polygamie fait l'objet de
certaines interrogations. Nous allons donc les poser et essayer d'y
répondre.
LES ASPECTS NÉGATIFS DE LA POLYGAMIE DU POINT DE VUE
DES AUTRES:
Comment faire face à la polygamie considérée au
niveau de ses conséquences psychologiques, sociales et économiques et à
travers ses aspects négatifs que les autres évoquent ici et là au point
que la permission législative de cette question est devenue un grand
point faible que les ennemis de l'Islam essayent d'exploiter, pour
prouver l'arriération de l'Islam et son écart de la justice et de
l'égalité dans son projet visant l'établissement d'une famille, stable,
solide et tranquille?
Ils disent dans ce sens que l'Islam fait de la femme
un simple moyen de plaisir mis au service des exigences de la sensualité
de l'homme. Et que l'Islam encourage la tendance charnelle de l'homme en
lui procurant l'occasion de la multiplicité des femmes qu'il peut
épouser. Et qu'il conduit à se laisser absorber dans ce domaine pour
s'éloigner des horizons spirituels qui l'élèvent au-dessus des besoins
charnels et de la nature animale qui lui est sous-jacente. Et, à leur
avis, tout cela n'est pas compatible avec la spiritualité de la religion
qui cherche à polir les instincts humains et à les assouplir pour les
mettre au service de tout ce qui satisfait, avec modération, les besoins
naturels de l'homme.
Ils disent aussi que la polygamie prive la maison de
sa tranquillité et de sa stabilité en nourrissant les haines des épouses
qui concurrencent entre elles pour attirer les attentions de l'homme.
Ces haines les conduisent au conflit surtout lorsque, sous la pression
d'un désir ou d'un sentiment, l'homme se montre attiré par l'une d'elles
aux dépens des autres, ce qui peut rendre ces dernières
psychologiquement "complexées" vis-à-vis de la première.
Et le complexe peut évoluer et devenir de plus en
plus grand entraînant ainsi d'innombrables problèmes généraux et
particuliers.
Les problèmes ne se réduisent pas aux épouses. Ils
peuvent toucher les enfants qui, à leur tour, peuvent, sous l'influence
de leurs mères, se "complexer" les uns des autres et leurs "complexes"
peuvent se transformer en sentiments agressifs envers le père qui peut
être poussé par sa passion à négliger les enfants dont la mère n'est pas
son épouse préférée.
Tout cela n'a rien à voir avec l'amour et la
compassion qui constituent les bases de la relation conjugale en Islam
et n'est en rien compatible avec l'idée de la cohabitation réciproque
qui est considérée par le Coran comme la caractéristique essentielle de
cette relation.
Ils disent encore que la polygamie porte atteinte aux
finances de la famille dans la mesure où les besoins multiples de
chacune des épouses augmentent les charges du budget. En outre, la
polygamie contribue à multiplier les naissances et celles-ci
affaiblissent les économies de l'individu et de la nation et nuisent à
l'éducation des enfants dans la mesure où l'homme, toujours pris par ses
nombreuses femmes, n'a pas le loisir de planifier pour éduquer ses
enfants et les orienter dans la bonne direction.
Et tout cela ne sert pas les vrais intérêts de
l'homme représentés dans sa tendance à vivre dans l'aisance, dans la
mesure où les difficultés financières et la pression des besoins peuvent
précipiter l'homme dans le gouffre de la déviation en l'éloignant du
vrai et du droit. Cela n'est-il pas exprimé dans l'invocation des "Bons
Caractères" qu'on trouve dans le recueil de l'Imam as-Sajjad (p) (as-Sahifa
as-sajjadiyya) où il dit: "Seigneur!
Protège-moi par l'aisance!
Ne fais pas user mon honneur en vous montrant
parcimonieux avec moi!
Car cela me poussera à tendre ma main à ceux qui te
tendent leurs mains et à demander à ceux qui sont les pires parmi ta
créature.
Car cela me précipitera dans la sédition puisque je
louerai celui qui me donne et blâmerai celui qui me prive, alors que
c'est Toi qui est, avant eux; Celui qui donne et Celui qui prive!".
Quant à l'éducation, elle est essentielle dans la
planification islamique pour le développement de la personnalité de
l'enfant dans le sens où Dieu a chargé l'homme de l'obligation de bien
soigner son enfant et de le bien éduquer pour le protéger de l'Enfer où
brûlent les hommes et les rochers, au moyen de la bonne éducation qui
approfondit sa foi et ses bons caractères et le conduit vers le droit
chemin.
Il disent tout cela et beaucoup d'autres choses aussi
sur les conséquences de ces problèmes au niveau de la vie sociale et
publique, car la nature des relations familiales fait qu'elles
retentissent au niveau de toutes les autres relations qu'elles soient
proches ou lointaines.
Ils évoquent aussi la dimension psychologique de la
femme en ce qui touche ses sentiments de persécution et d'oppression qui
naissent dans les conditions de la perturbation de la relation conjugale
sous la polygamie qui porte préjudice à l'humanité de la femme et la
transforme en un être humain opprimé et complexé.
Les considérations en rapport avec la civilisation et
le modernisme occupent une bonne place dans le discours de ceux qui
attaquent la polygamie pour la considérer comme une déviation vis-à-vis
des valeurs de la civilisation, valeurs qui convergent vers la
sauvegarde de l'humanité dans le mouvement de la législation pour la
vie.
LA QUALIFICATION LÉGALE ET LA BALANCE DES AVANTAGES ET
DES INCONVENIENTS
Mais nous ne trouvons rien, dans tout cela, qui
pourrait signifier la présence d'une faille dans l'attitude de la
législation islamique vis-à-vis de la polygamie. Car nous essayons –lorsque
nous évaluons une qualification légale- d'étudier les avantages et les
inconvénients, les nuisances et les utilités. Si ce qui est avantageux
prime par rapport à ce qui est désavantageux, on peut le classer dans la
catégorie positive. Si, au contraire, ce qui prime est le désavantageux,
on doit le classer dans la catégorie négative. C'est que les
qualifications légales sont déterminées, à notre avis, à la lumière des
avantages et des inconvénients et il ne suffit pas pour une
qualification négative qu'elle soit dans une situation de faiblesse,
mais il faut que sa faiblesse soit plus sensible que sa force et sa
faiblesse. Cela se dégage de la parole où Dieu dit: "Ils t'interrogent
au sujet du vin et des jeux de hasard. Dis: ils comportent un grand
péché et un avantage; mais le péché qui s'y trouve est plus grand que
leur utilité". Coran, al-Baqara (la Vache), II 219.
A la lumière de cette considération, nous trouvons
que l'existence de certains aspects négatifs dans les objets des
qualifications n'implique pas la suppression de ces qualifications. Il
faut, pour le faire, que les aspects négatifs de l'objet soient plus
sensibles que ses aspects positifs.
COMPARAISON ENTRE LES ASPECTS POSITIFS ET LES ASPECTS
NÉGATIFS DE LA POLYGAMIE
Il est possible de cerner la nature de cette question
et de savoir, à travers la comparaison, comment les aspects positifs et
négatifs de cette question se rencontrent pour aboutir à la conclusion.
Certains chercheurs ont ainsi évoqué plusieurs situations où l'intérêt
exige la polygamie.
Parmi ces situations, on peut parler de celle où la
polygamie se présente, parfois et chez certaines personnes, comme un
besoin avec lequel la monogamie devient une source de déviation. On peut
rencontrer des cas de ce genre chez beaucoup de personnes parmi celles
qui ont, à côté de leurs relations légales, des relations illégales
qu'ils établissent sous le poids du besoin pressant ou sous l'influence
d'une situation imprévue. On peut aussi dire que la polygamie représente
un fait historique et général présent dans les relations légales et
illégales à la fois. Cela nous permet de penser qu'elle est un phénomène
humain universel qui se pratiquait et se pratique encore dans les
sociétés primitives aussi bien que dans les sociétés civilisées qui
récusent la polygamie dans le domaine juridique pour l'adopter dans le
domaine pratique.
Quant aux vues disant que la polygamie encourage la
sensualité dans le mouvement de l'instinct chez l'homme qu'elle
approcherait de l'animalité et l'éloignerait de la spiritualité, ces
vues tirent leur essence de l'idéalisme et ne sont pas fondées sur une
vision réaliste des choses. Car l'Islam ne veut pas que l'homme étouffe
ses désirs et les considère comme des maux, des défauts ou des
expressions de décadence. Il veut qu'il les considère comme des besoins
naturels semblables aux besoins que nous avons de manger et de boire et
qu'il agisse dans le sens de les organiser et de les placer dans leurs
limites naturelles. L'Islam ne veut pas que l'homme soit bouleversé et
poussé vers les complexes et la déviation. Il veut qu'il vive droitement
et naturellement à travers la satisfaction équilibrée de ses besoins.
Au-delà de ces limites, il lui laisse la liberté de répondre
positivement et de manière réfléchie à l'appel de ses désirs, ou de se
contenter du minimum tout en disposant des moyens de réaliser le maximum
par les voies légales. En vérité, il y a une différence entre la
pression qu'on exerce sur soi à partir d'une situation qui nous oblige à
agir ou ne pas agir et celle qu'on exerce à partir d'une situation qui
nous laisse le choix d'agir ou de ne pas agir. La différence est que
dans la première situation, l'homme se trouve en proie aux sentiments de
perplexité et d'étouffement psychique.
Quant aux vues selon lesquelles la femme est
transformée en un simple objet de plaisir pour l'homme, ces vues ne
résistent pas à la critique dans la mesure où la sexualité est un besoin
pour l'homme et pour la femme et dans les deux situations de la
polygamie et de la monogamie. Ainsi, si on considère les choses dans ce
sens, on doit supprimer la racine même du mariage… En un mot, l'Islam
est une religion réaliste qui cherche à résoudre le problème par la
logique réaliste et non pas par la logique idéaliste. Il cherche à
fonder la solution sur la base du problème tel qu'il se pose réellement
pour couper cours aux prétextes avancés par l'homme pour justifier la
déviation.
Quant aux vues disant que la polygamie ne sert pas la
cause da la stabilité, de la tranquillité, de l'amour et de la
compassion dans la maison conjugale, ces vues ne nous posent aucun
problème, car tout problème imprévu se posant dans une situation bien
déterminée doit être tel qu'il se pose dans la situation opposée qui
pose, à son tour, un problème différent. Ainsi, la comparaison des deux
situations devient le seul moyen d'opter pour l'une ou pour l'autre
solution. C’est donc cette question qui se pose dans ce domaine.
La polygamie est issue, comme nous l'avons dit, d'un
besoin du sujet. Si on néglige ce besoin, on aboutit à l'une des deux
situations suivantes: se contenter de la monogamie et souffrir l'état
psychologique complexé inhérent à cette situation, ou avoir des
relations multiples dans le cadre de l'illégalité. Dans les deux cas,
nous nous trouvons face à l'angoisse, aux complexes, à l'instabilité
psychique et à la précarité de la relation conjugale qui ne peut que
subir les différents réactions à ces situations fondées sur des bases
non réalistes et instables. Mais la polygamie fondée sur des bases
légales reste, avec tous les problèmes qu'elle pose, un moyen qui
garantit le contrôle des besoins limités dans leur cadre réaliste et qui
cerne le problème dans un cadre limité dans l'intention de le résoudre à
la lumière des moralités de l'Islam qui, d'une part, réduisent les
retombées négatives du phénomène et, d'autre part, permettent de
continuer à échanger avec le fait accompli qui habitue l'être humain à
cohabiter avec le problème et à l'intégrer…
Il est peut-être possible de traiter la question sous
un autre angle: la moralité des deux époux reste l'élément essentiel
dans la confrontation avec les problèmes de la vie conjugale, même dans
la situation de la monogamie. Il se peut que, sous la monogamie, la vie
se complique et se bouleverse dans le cas où la moralité est négative
alors que, sous la polygamie, elle pourrait se stabiliser dans la
droiture et la solidarité dans le cas où la moralité est positive. La
monogamie et la polygamie sont considérées comme faisant partie des
aspects extérieurs de la relation, ce qui fait de leur examen une
question pouvant avoir plus d'une seule solution.
Quant aux difficultés de la réalité économique dans
le cadre de la polygamie, elles ne sont pas présentes dans toutes les
situations et avec toutes les personnes. Certains peuvent être assez
aisés pour répondre aux besoins de la polygamie. Certains autres peuvent
aller, sans embarras, vers le développement de leurs ressources
économiques pour servir un tel objectif. Cela pourrait même aboutir à la
prospérité économique à travers la diversification de la main d'œuvre
qui en résulte dans les conditions où la famille en éprouve le besoin.
La polygamie pourrait aussi sauver la famille des difficultés
économiques occasionnées par les dépenses illimitées des relations
illégales qui prennent ordinairement la place de la polygamie légale. Si
l'on ajoute le fait que l'Islam favorise la tendance à se contenter de
la monogamie, dans les conditions économiquement difficiles qui font des
dépenses que nécessite la polygamie une chose insupportable et empêchent
l'homme d'être juste dans la répartition des dépenses, on arrive à la
conclusion décisive qui place l'affaire dans son cadre normal et naturel
où la vie se déroule dans l'aisance et non pas dans les conditions de la
difficulté économique…
Quant à la question des naissances illimitées et ses
influences sur la réalité économique de la famille et de la communauté,
elle doit prendre en compte le mouvement de la réalité. La communauté
peut avoir besoin, dans certaines conditions, d'un taux de naissances
élevé alors que d'autres conditions peuvent l'obliger à réduire le taux
des naissances. Un troisième genre de conditions peut aussi intervenir
pour imposer un état d'équilibre entre les deux situations précédentes.
Le taux élevé des naissances n'est pas une valeur universellement
négative et le taux réduit n'est pas une valeur universellement
positive. Les deux valeurs sont soumises, comme toutes les autres
valeurs qui tirent leurs raisons d'être de la réalité extérieure, aux
conditions objectives qui animent le milieu extérieur. C'est exactement
cette question qui se pose à notre époque actuelle où certains Etats,
même dans les pays les plus civilisés, accordent des privilèges
économiques aux familles nombreuses selon l'abondance des ressources
économiques et le besoin du développement démographique de la nation,
alors que certains autres Etats, parmi ceux qui connaissent des
situations économiques graves, déclarent une sorte de guerre contre les
taux élevés de naissance, dans le but d'éviter l'effondrement de leurs
économies.
Deux points doivent être posés au sujet de cette
question:
Lé premièr: la polygamie n'es pas liée aux taux de
naissances élevés car ces taux peuvent toujours être élevés dans la
monogamie si les naissances ne sont pas limitées. Si nous prenons en
considération les divers moyens légaux pouvant être utilisés pour
l'organisation de la famille dans ce domaine, nous trouvons alors qu'il
est possible de maîtriser la situation et de résoudre le problème dans
les deux situations de la polygamie et de la monogamie.
Le second: il existe dans la croyance de l'homme de
foi une dimension suprasensible qui permet de rencontrer Dieu qui donne
à qui Il veut sans que l'homme ne sache par où le don pourrait lui
parvenir: Dieu accorde le don en fonction du besoin. La question n'est
donc pas liée aux seuls calculs matériels, car il existe plus d'une
dimension suprasensible qui ouvre la réalité à plus d'une solution dans
le cadre de la clémence de Dieu.
Quant à la question de l'éducation qui pourrait être,
dans les condition de la famille à nombre d'enfants réduit, plus
profonde qu'elle ne pourrait pas l'être dans la conditions de la famille
nombreuse, elle diffère quant à ses conséquences positives ou négatives
en fonction des conditions personnelles. On peut effectivement noter une
déviation éducative chez un enfant unique en face d'une droiture
éducative chez les enfants des familles nombreuses. C'est que les moyens
personnels de l'homme, comme l'effort, la fortune, la notabilité ou la
situation générale, peuvent l'aider à orienter l'éducation d'une manière
qui peut ne pas être possible dans des conditions différentes. De ce
fait, la question est liée aux dispositions extérieures qui entourent
l'homme dans les conditions de la réalité objective.
Ceux qui prônent la polygamie peuvent signaler à ceux
qui prônent la monogamie un grand nombre de problèmes réels, comme:
1- Les statistiques montrent que le nombre naturel
des femmes est supérieur au nombre des hommes, ce qui prive une partie
des femmes de leurs chances au mariage dans la situation de la monogamie.
2- Les victimes des guerres sont beaucoup plus
nombreuses aux rangs des hommes car ce sont les hommes qui se chargent
de la guerre, dans la plupart des cas, alors que les femmes travaillent,
même pendant la guerre, dans des conditions plus sûres et moins
dangereuses. Cela fait que la guerre devient une grande source des
problèmes issus de la monogamie. On a dit, à ce propos qu'un député
allemand, a demandé au parlement de son pays d'introduire la législation
de la polygamie pour faire face aux conséquences désastreuses de la
deuxième guerre mondiale au niveau de la baisse du nombre des hommes
comparé à celui des femmes.
3- Dans le cas de la stérilité de la femme et au
moment où le mari sent le besoin de la paternité sans vouloir se séparer
de sa femme avec laquelle il se trouve en état de parfaite entente, la
polygamie se présente comme la meilleure solution possible.
Il existe plus d'une situation réelle parmi celles
qui posent des problèmes pour la monogamie et font de la polygamie une
solution normale et plus proche de la nature humaine soumise à des
pulsions et des besoins physiques et spirituels dont la satisfaction est
indispensable pour l'homme qui cherche l'harmonie avec l'état
d'équilibre psychique qu'impose le besoin de la stabilité.
POURQUOI L'HOMME A-T-IL DROIT À LA POLYGAMIE ET NON
PAS LA FEMME?
Cette affaire peut être posée à travers une question
qui se pose à l'esprit, à savoir : pourquoi l'Islam a-t-il permis à
l'homme de prendre plusieurs épouses et n'a-t-il pas permis à la femme
de prendre plusieurs époux?
La réponse comprend deux points:
- La première est que le régime familial patriarcal
fondé sur la personne du père en tant que représentant original de la
famille est un régime fondamental en Islam. Il se peut aussi qu'il soit
fondamental dans la réalité humaine. Si l'histoire avait connu, dans
certains de ses épisodes, le régime matriarcal, c'est-à-dire ce régime
gouverné par la mère et dans lequel le père est subordonné à la mère
dans ses fonctions familiales, cela ne peut être considéré que comme un
écart et non comme une norme. L'Islam a adopté ce régime patriarcal pour
considérer l'homme comme responsable de la famille et de ses affaires
vitales et comme source de sa généalogie. Cela ne veut pas dire que le
rôle de la mère et sa généalogie sont annulés. Ils sont seulement
secondaires de ce point de vue, et à la lumière de ces faits, il n'est
pas possible d'accepter la polygamie dans la mesure où elle pose le
problème de l'appartenance généalogique des enfants.
- La seconde est que la législation ne peut que
résulter d'un besoin d'engagement dans la vie. Et nous avons déjà parlé
des fondements de la législation concernant la polygamie et qui ont
leurs raisons dans la réalité aussi bien que dans l'appel de la nature.
Nous avons même adopté l'idée voulant que l'histoire de l'homme est
celle de la pluralité des relations sexuelles de l'homme, que ces
relations soient légales ou illégales, ce qui donne à penser que la
monogamie ne peut aucunement donner une solution au problème et que, de
ce fait, elle doit être dépassée pour une autre option.
Pour ce qui est de la polyandrie, elle est un état
historiquement anormal, même chez les tribus primitives qui n'ont pas
connu l'évolution de l'historie. Il n'est donc pas besoin pour la
législation de s'arrêter devant cet état pour lui instituer des lois et
des qualifications. En considérant les raisons de la polygamie, nous
trouvons les situations de guerre où les victimes sont beaucoup plus
nombreuses au niveau des hommes qu'au niveau des femmes. Cela fait du
nombre plus élevé de femmes et du nombre plus réduit d'hommes un état
naturel qui impose la pluralité des relations de l'homme et non pas
celle des relations de la femme, et ce dans le but de résoudre les
problèmes sexuels et spirituels de la femme qui cherche à avoir une
relation normale avec l'homme.
… Il existe un autre point qui mérite d'être traité:
l'instinct de l'homme appelle la pluralité plus que l'instinct de la
femme car l'excitabilité de l'homme est plus intense et plus rapide que
celle de la femme. La femme a plus besoin que l'homme d'une préparation
psychique et physique pour répondre positivement aux éléments
excitateurs de l'instinct. Il est connu que l'homme atteint son orgasme
avant la femme et cela conduit à des problèmes psychiques et physiques
pour la femme dans la mesure où elle ne se sent pas aussi satisfaite que
l'homme. On peut dire à partir de ce fait que l'excitabilité de la femme
n'est pas aussi positive que celle de l'homme. On peut même remarquer
dans la vie quotidienne que c'est l'homme qui, attiré par l'appel de
l'instinct, poursuit la femme et lui prépare l'atmosphère de la
déviation, alors que, dans beaucoup de situations, la séduction de
l'homme par la femme est occasionnée par des facteurs économiques ou par
d'autres facteurs extérieurs.
Certains pays européens et américains ont connu des
situations semblables à la polygamie et à la polyandrie dans ce que l'on
appelle l'opération du mariage collectif où plusieurs hommes et
plusieurs femmes cohabitent ensemble dans une vie conjugale commune.
Mais la réalité a prouvé l'échec de cette expérience, car elle leur a
occasionné plus d’un problème sans pour autant leur procurer la
satisfaction psychique et le bonheur, surtout pour ce qui est de la
femme.
On peut aussi remarquer que la femme tend à avoir une
relation unique plus qu'elle ne tend à avoir des relations multiples.
C'est pour cette raison que le phénomène de la fidélité est plus en
vigueur chez les femmes et non pas chez les hommes… La femme se sent
satisfaite avec une relation unique et naturelle dans la mesure où elle
modère son excitabilité, alors qu'un tel sentiment de satisfaction n'est
pas présent chez l'homme.
A la lumière de ces considérations, nous nous
trouvons face à la vraie réalité qui impose le besoin de la polygamie en
raison de l'instinct et des dispositions humaines générales et cela pose
une question à la mesure du phénomène que la législation doit confronter
en lui proposant des solutions pratiques. En même temps, nous ne pensons
pas que cela ne constitue pas un besoin à la mesure de la question et du
phénomène tel qu'ils sont enregistrés chez la femme. Tout au plus, nous
ne trouvons, chez elle, que des états passagers et occasionnels
n'exigeant pas un grand intérêt.
Ainsi, nous trouvons que la législation islamique
fait face à la réalité et donne des solutions aux problèmes complexes à
partir des besoins naturels de l'homme. Il en est ainsi car l'Islam ne
légifère pas pour les anges, mais pour les hommes et la polygamie est
une solution naturelle et normale au problème de l'homme et de la femme
à la fois et ce du double point de vue sexuel et social.
LA CONDITION DE LA POLYGAMIE, OU LA LIBERTÉ DANS LES
LIMITES DE LA LOI: RÉALISER L'ÉQUILIBRE.
Comme la polygamie est permise et non obligatoire,
l'homme peut exercer sa liberté à travers ses conditions pour arriver à
la réalisation de l'équilibre dans sa vie. Il se peut qu'il trouve son
intérêt dans la monogamie, dans la polygamie ou dans le célibat. De
cette manière, il mène sa vie et pratique sur la base de la Loi en
s'éloignant ainsi des situations illégales dans toutes ses conditions et
en confrontant la réalité avec les attitudes positives de la légalité,
loin des attitudes négatives de la déviation.
Il est peut-être nécessaire de faire face à
l'évaluation intellectuelle et pratique des relations dans la logique
des qualifications légales en respectant les pratiques fondées sur ces
bases et compatibles avec les moralités de la Loi, même si ces pratiques
et moralités sont écartées des traditions sociales d'origines non
islamiques. Ces traditions sont en vigueur au niveau de certains aspects
de notre réalité vécue actuellement où l'on se laisse influencer par les
valeurs chrétiennes idéalistes qui insistent sur la vie monacale (le
célibat) et sur la nécessité de s'éloigner des instincts et donnent à ce
genre d'attitude le statut des valeurs spirituelles fondamentales en
considérant l'homme qui étouffe son instinct comme un saint et l'homme
qui obéit à ses instincts, d'une manière naturelle, comme inférieur sur
l'échelle des valeurs. A partir de ces considérations, l'attitude
chrétienne voit dans la question de la polygamie et de la pluralité des
relations sexuelles un état de sensualité indigne de l'homme de foi qui
cherche à cristalliser les valeurs spirituelles dans sa vie, avec tout
ce qu'elles représentent en matière d'abstinence, de renoncement aux
désirs et de dénigrement de la vie matérielle…
De son côté, l'Islam refuse cette logique et n'adopte
pas ces concepts. Il considère les instincts déposés par Dieu dans
l'entité humaine comme des instances naturelles qu'il doit satisfaire
d'une manière équilibrée. Tout instinct a sa faim et sa soif et l'homme
a le droit de satisfaire sa faim et d'éteindre l'ardeur de sa soif,
exactement comme c'est le cas pour ce qui est des besoins physiques et
naturels… Se comporter ainsi n'est pas contraire à la valeur et la
sensualité modérée n'est pas mauvaise dans la vie. L'Islam ne la
considère pas comme contraire à la spiritualité, car la spiritualité de
l'Islam ne consiste pas à s'écarter des besoins physiques. Tout ce que
l'Islam demande est que l'homme n'élève pas ses besoins au rang des
valeurs fondamentales de la vie et qu'il les considère à partir de son
libre arbitre qui peut dire "non" tout comme il peut dire "oui", sans se
soumettre aux pressions conduisant à la déviation. De le sorte, la
volonté de l'homme n'est pas l'esclave des besoins au cas où la vie met
l'homme devant le choix d'agir avec ses principes ou de s'incliner
devant la pression de ses désirs.
C'est en cela que consiste le sens réel de
l'ascétisme dans tout ce qu'il représente comme sentiments permettant à
l'homme de se libérer des liens de l'asservissement par la matière.
C'est en cela que consiste la spiritualité intérieure qui permet à
l'homme de faire face à la vie à travers sa capacité de maîtriser son
mouvement. La faim n'est pas, en elle-même, une valeur spirituelle et le
renoncement aux désirs n'a pas, en lui-même, un sens spirituel, sauf
dans ce qu'il représente comme mouvement de la volonté consciente vers
le refus de ce qui est abominable ou vers l'exercice à le confronter
dans l'espoir de se rapprocher de Dieu dans la mesure où cela permet à
l'homme d'exercer sa liberté en sa présence.
Sur la base de ces considérations, nous trouvons que
la polygamie n'est pas contraire à la valeur et que la monogamie n'est
pas la valeur, mais un besoin normal que l'homme peut vivre en fonction
de ses conditions intérieures et extérieures. Il peut ainsi opter pour
la polygamie ou pour la monogamie… et être proche de Dieu dans les deux
cas dans la mesure où il agit à la lumière de la législation qui
considère le fait de s'autoriser la polygamie comme un engagement
islamique, tout comme le fait de se contenter de la monogamie qui est
aussi un engagement dans la saine voie divine.
Mais l'homme peut mal utiliser cette autorisation.
Parmi les aspects de ce mauvais usage, on note la polygamie issue d'une
disposition capricieuse où, poussé par ses besoins insistants, l'homme
part de son désir de diversifier ses relations sans que cela ne soit
profondément fondé dans sa vie affective ou dans sa vie en général. Le
désir capricieux et occasionnel qui peut être fougueux aujourd'hui pour
s'éteindre demain ne doit pas être le fondement de la relation conjugale
car cela fait du mariage une question de tempérament et non pas une
question de besoin réel. Il se peut que ce fait soit l'une des raisons
pour lesquelles l'homme ne doit pas opter pour la polygamie. L'aspect
positif dans ce domaine est que la polygamie soit la réponse à un besoin
profondément enraciné dans l'âme ou d'un autre besoin aussi profond
qu'impose la réalité car c'est cette profondeur qui fait du mariage une
responsabilité et c'est elle qui réalise la responsabilité dans le
processus de l'équilibre du mariage.
ÊTRE JUSTE AVEC SES FEMMES
Une autre question se pose dans ce domine. C'est
celle d'être juste avec ses femmes.
Le noble Coran dit: "...Si vous craignez de ne pas
être équitables, prenez une seule femme, …". Coran, "An-Nisa’" (les
Femmes), IV 3.
Toute relation humaine doit être fondée sur la
justice, que cette relation soit conjugale ou autre, car Dieu veut que
la vie s'engage dans la voie de la justice. Pour cette raison, la
polygamie est conditionnée par la justice que l'homme doit respecter au
niveau de ses responsabilités et engagements envers ses femmes. Il ne
peut pas les négliger au niveau de leurs droits et au niveau de ses
devoirs envers elles. Ce qui est, peut-être, plus proche de la ligne de
la piété est que l'homme étudie ses possibilités avant d'entrer dans une
telle expérience. Alors, il peut avancer seulement s'il trouve en
lui-même la capacité de remplir ses engagements légaux. Mais si, au
contraire, il trouve que la question n'est pas assez claire et qu'il
risque de ne pas pouvoir être juste en raison de ses conditions
générales et personnelles, il lui est préférable de se contenter d'une
seule femme, car cela est plus proche de la piété et correspond mieux à
ses possibilités matérielles. Il ne doit donc pas se charger d'un
fardeau qu'il ne peut pas supporter.
LA JUSTICE EST-ELLE UNE CONDITION POUR LA VALIDITÉ DE
LA POLYGAMIE?
Une autre question peut se poser : la justice, ou les
possibilités de la justice, sont-elles une condition nécessaire pour la
validité de la relation polygame, de sorte que le contrat avec plus
d'une seule femme n'est pas valide si l'homme craint de ne pas pouvoir
être juste, ou bien la justice n'est-elle pas une condition de la
validité du contrat, mais seulement une condition de la fidélité à la
ligne de la responsabilité légale, sans que cela ne concerne l'aspect
juridique du contrat?
Nous disons, pour répondre, que la question peut
paraître, au niveau de l'apparence, comme si la justice est une
condition juridique pour la validité et l'exécution du contrat… dans la
mesure où Dieu n'a pas autorisé la polygamie dans les conditions de la
crainte, de la part de l'homme, de ne pas être juste. Mais les savants
ont admis la validité du contrat dans toutes les situations et n'ont pas
opter pour l'annulation du contrat au cas où l'on se heurte à
l'incapacité du mari de verser la pension qui est la condition de la
justice. Il se peut que la raison soit dans le fait que la suite du
verset "cela vaut mieux que de se trouver avec une famille nombreuse",
signifie que la condition a la valeur d'un conseil ou d'une instruction
et non pas celle de l'obligation légale et juridique… car se marier avec
plus d'une seule femme tout en craignant de ne pas pouvoir être juste
expose l'homme à des problèmes légaux dans sa relation et le met dans
une situation instable du point de vue économique… et Dieu connaît mieux
la vérité de ses institutions.
COMMENT TROUVER L'ÉQUILIBRE ENTRE CE VERSET ET CELUI
QUI NIE LA POSSIBILITÉ DE LA JUSTICE?
Une autre question peut se poser : la comparaison de
ce verset avec le verset qui dit: "Vous ne pouvez pas être justes à
l'égard de chacune de vos femmes, même si vous en avez le désir. Ne
soyez donc pas trop partiaux et ne laissez pas l'une d'entre elles comme
en suspens". Coran, an-Nisa' (Les Femmes) IV 129, nous conduit au
résultat suivant: Dieu interdit la polygamie car Il l'a conditionnée à
la justice que le second verset considère comme impossible à réaliser,
même au cas où l'on tient ardemment à la respecter, ce qui donne à
penser que la Législation est entravée d'une manière qui empêche son
application en lui donnant l'aspect d'une solution habile qui annule
l'autorisation de la polygamie d'une façon indirecte.
On peut dire à ce propos:
Premièrement: nous avons déjà signalé que la
condition intervient dans le sens de la prévention liée à la situation
légale et économique de l'homme et non pas dans le sens de l'obligation
juridique.
Deuxièmement: la justice ayant le statut de condition dans le premier
verset est la justice dans le versement de la pension, alors que la
justice dont parle le seconde verset est la justice en matière d'amour
et du penchant sentimental. Cela se comprend de la parole divine disant:
Ne soyez donc pas trop partiaux et ne laissez pas l'une d'entre elles
comme en suspens", Coran, an-Nisa' (les Femmes) IV 129, qui représente
l'ordre divin interdisant la déviation, au niveau affectif, au point
avec lequel l'homme arrive à abandonner sa femme et à la laisser "suspendue",
entre le mariage et le divorce. On peut même dire que cette manière de
souligner l'envergure que la relation doit représenter un aveu de sa
légitimité. La distinction des deux sens de la "justice" dans les deux
versets provient des Imams de la Famille du Prophète (que la paix soit
sur eux). |