LA PROMISCUITÉ ET LA TRADITION
ATTRIBUÉE À AZ-ZAHRÂ’
Il se peut que de nombreuses personnes se demandent s'il
est possible de considérer la célèbre Tradition de Fatima az-Zahrâ’ (p)
disant: "il vaut mieux pour les femmes de ne pas voir les hommes et
de ne pas être vues par eux" de la considérer comme une
qualification légale destinée à régir le mouvement de la femme dans la
société. Pour répondre, on doit tout d'abord signaler qu'il est
nécessaire de comprendre les paroles des "Ahl al-Bayt" (les Gens de la
Famille) (p) ou celles d'autres personnes qui parlent sur la base de la
responsabilité légale, à la lumière des exigences rhétoriques
représentées dans le style en vigueur dans l'expression littéraire en
langue arabe. En effet, les rhétoriciens parlent de plusieurs styles
dont, d'une part, celui où les mots sont utilisés dans leurs
significations propres et, d'autre part, celui où les mots sont utilisés
dans un sens figuré ou métaphorique.
C'est à la lumière de cette considération que nous
devons essayer de comprendre les paroles de notre Maîtresse Fatima
az-Zahrâ’ (p). Ses paroles ne concernent pas la qualification légale qui
doit régir le comportement de la femme dans sa vie publique. Ses paroles
ne concernent pas la vision des hommes par la femme ou celle de la femme
par les hommes, ni ce qu'elle peut voir des hommes ou ce que les hommes
peuvent voir d'elle. En prononçant ces paroles, Az-Zahrâ’ (p) était en
train d'évoquer la question de cette promiscuité qui peut avoir un
impact négatif sur la pureté spirituelle de la femme dans son rapport à
l'homme, ou sur la pureté spirituelle de l'homme dans son rapport à la
femme, sur la base de la possibilité qu'a la promiscuité d'avoir un
impact négatif dans ce domaine. Pour comprendre cette nuance, on peut
donner l'exemple des regards qui peuvent, lorsqu'ils reflètent l'état
spontané du désir naturel de l'homme et de la femme, avoir un impact
négatif sur le caractère moral de l'homme et de la femme. Cela est en
rapport avec la nature des sentiments que le regard peut refléter et
avec la nature de la conduite qu'un regard peut provoquer.
Un certain poète a peut-être bien exprimé cette question
en disant:
"Regarder, sourire et saluer,
"parler, prendre un rendez-vous et se rencontrer!
Il est vrai que la poésie va dans un autre sens, mais
elle peut toujours être significative. Toutefois, on peut réfléchir sur
les significations d'une Tradition prophétique comme celle qui dit:
"Tu as droit au premier regard, mais le deuxième est un péché", ou comme
celle qui dit: "Le regard est une flèche parmi les flèches du Diable"...
Az-Zahrâ’ (p) voulait dire, par la voie de la métaphore,
ce qui suit: "Si la femme peut éviter la zone de la promiscuité, de
sorte qu'elle ne voit pas un homme et qu'un homme ne la voit pas, cela
vaut mieux pour elle en raison de son impact sur le plan
psychologique".
Ainsi, elle aborde la question de la promiscuité sous
l'angle de la plus grande pureté spirituelle que la femme et l'homme
sont en mesure d'atteindre.
Mais il est à remarquer que la zone de cette plus grande
pureté qui constitue une valeur islamique supérieure, sur l'échelle des
grands buts que la perfection islamique cherche à atteindre, ne relève
pas du champ des responsabilités légales au sens propre.
La femme n'a pas l'obligation légale de ne pas regarder
l'homme. Il ne lui est pas illicite d'être regardée par l'homme, dans la
limite de ce que la vision, par l'un et l'autre sexe, est licite. Il en
est ainsi surtout lorsque cette question se pose dans la sphère des
choses nécessaires de la vie publique, ou dans la sphère des exigences
politiques et culturelles en rapport avec la lutte que la femme
musulmane est invitée à mener, dans le respect total de la tenue légale.
Il en est ainsi lors de ses dialogues avec les hommes et dans le cadre
de ses discours ayant trait aux affaires publiques et missionnaires qui
exigent, dans maintes situations, une participation active de la part de
la femme. Les paroles de Fatima az-Zahrâ’ (p) posent la question de la
promiscuité dans la sphère supérieure, au sommet de la chose morale, en
utilisant ce que les rhétoriciens appellent la forme intensive qui
exprime l'idée dans son plus haut degré. Néanmoins, ces paroles ne
constituent pas une responsabilité légale dans la mesure où nous savons
que az-Zahrâ’ (p), son histoire nous l'apprend bien, voyait les hommes
et parlait avec eux et, de leur côté, les hommes la voyaient et
parlaient avec elle. Cela prouve que la question ne se pose pas dans le
cadre des directives ordinaires, mais dans celui des choses moralement
supérieures qui, ne relevant pas des obligations de l'être humain, sont
posées devant lui en tant que sommet, en tant que perspective vers
laquelle l'être humain peut se diriger dans le cadre de sa recherche de
la moralité supérieure. |